Banques et établissements financiers français : La réduction de coûts et l’IA Générative définissent de nouvelles priorité
En 2022 et 2023, les banques européennes ont enregistré d’excellents résultats financiers, tirés par la hausse des taux d’intérêt après des années de niveaux historiquement bas. La performance des banques françaises a été, quant à elle, plus mitigée. En effet, les prêts immobiliers sont, en France, dans une très large majorité à taux fixe, et le taux maximum auquel les banques peuvent prêter (taux d’usure) est réglementé et augmente donc plus lentement que dans les pays voisins. Dans le même temps, la hausse du coût du capital a été bien plus rapide qu’ailleurs, en raison de l’augmentation du taux d’intérêt du livret A, le compte d’épargne le plus populaire du pays. La marge nette d’intérêt (MNI) du secteur s’est donc fortement dégradée (-34% pour les Caisses d’Épargne, -27% pour la Société Générale, -24% pour la Banque Populaire, -18% pour le Crédit Agricole, -6% pour BNP Paribas…) et a eu un impact significatif sur les performances financières globales. Ces difficultés ont été illustrées par le nouveau plan stratégique 2024/2026, présenté par la Société Générale en septembre 2023, qui ne vise que 0% à 2% de croissance par an sur la période (vs. +3%/an dans son précédent plan stratégique).
La dégradation de l’environnement économique a également conduit les banques françaises à se concentrer sur la réduction des coûts. Epine dorsale des activités cœur des banques, l’IT a évidemment un énorme rôle à jouer avec, comme grandes tendances de fond :
- la digitalisation croissante des processus, notamment des interactions clients, afin d’améliorer la qualité et de réduire les coûts ;
- le développement de la banque en ligne, la crise COVID-19 ayant accéléré le changement de comportement des clients ;
- l’Open Banking pour tirer parti des API et permettre aux développeurs tiers et aux FinTech de créer des applications et de s’intégrer dans les écosystèmes des banques, pour une innovation plus rapide et moins coûteuse.
Dans un tel contexte, les projets de transformation informatique se multiplient afin d’aider les banques françaises à innover et améliorer leurs structures de coûts. Parmi les grands projets, nous pouvons citer BPCE qui, en avril 2022, a créé une nouvelle société, BPCE Solutions Informatiques, regroupant les équipes de développement informatique des réseaux Banque Populaire et Caisse d’Épargne. Avec 2 600 collaborateurs, c’est un nouveau poids lourd de l’informatique en France avec un seul client, BPCE. Enfin, le plus grand projet de transformation informatique du secteur bancaire en France a été la récente fusion des réseaux de la Société Générale et du Crédit du Nord. Complété en mai 2023 après plus de 30 mois et 4 millions d’heures de travaux, il a permis à la Société Générale de transférer les 2 millions de clients des 9 banques du réseau Crédit du Nord vers son propre système informatique.
2023 aura aussi été l’année de l’émergence de l’IA générative avec le lancement de dizaines de projets. Le secteur bancaire, avec d’importants budgets IT et un métier basé, en grande partie, sur l’exploitation des données et sur un fort niveau de dématérialisation, est un des secteurs potentiellement les plus concernés par l’IA générative. En effet, le nombre d’applications se multiplient à la fois pour les métiers du back-office (conformité réglementaire, détection du blanchiment d’argent, évaluation des risques…) que ceux du front-office (services bancaires personnalisés, trading algorithmique, gestion de portefeuilles…). Avec de telles promesses, les investissements augmentent donc rapidement. Par exemple, le Crédit Agricole a lancé au sein de son DataLab une AI factory pour concevoir des solutions d’IA pour servir ses différentes entités tandis que BPCE a acquis début 2023 Rel8ted, une start-up américaine spécialisée dans l’analyse de données pour répondre à des besoins similaires.
Finalement, tous les projets de modernisation informatique et d’innovation autour d’un numérique grandissant ont permis une solide croissance du marché des services informatiques dans le secteur Banque & Finance (+6,5 % en 2022 et +3,9 % en 2023 selon PAC) avec, néanmoins, un net ralentissement à noter sur le second semestre 2023 à la suite de la fin du projet de fusion Société Générale / Crédit du Nordit et à la volonté des banques de prioritiser la réduction de leurs coûts face à des conditions de marché plus volatiles. Nous prévoyons donc un nouveau ralentissement de la croissance des services informatiques en 2024, à 3,0%, mais demeurons positifs à l’égard des tendances de fonds car ce sont bien les investissements adéquats en outils numériques qui permettront aux banques de mieux utiliser les données personnelles et métier pour offrir de nouveaux services plus personnalisés et gagner en compétitivité et rentabilité.