Le Metaverse d’entreprise : gadget ou véritable valeur ajoutée ?

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Avant la renaissance de la tendance en 2021, Second Life était l'un des projets de Metaverse les plus prometteurs. À son apogée (2006-2007), de nombreuses marques avaient ouvert leur boutique dans cet univers et même les personnages politiques, comme Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy, y tenaient des meetings de campagne présidentielle.

Aujourd'hui, les capacités du réseau se sont considérablement améliorées, avec la démocratisation du cloud computing, de l'IA et de la 4G/5G. Ajoutons à cela les technologies Blockchain et NFT et on obtient un terreau parfait pour faire pousser un nouveau monde d’opportunités. Cela pourrait constituer une conjoncture favorable permettant au Metaverse B2C de s’implanter durablement dans notre quotidien, voire de supplanter Internet tel qu’on le connaît.

Les principaux objectifs du Metaverse d'entreprise sont d'augmenter la productivité et la créativité en facilitant la collaboration et la manipulation de données complexes ou de modèles 3D. Les cas d'utilisation usuels B2B comprennent la conception collaborative en VR/AR de produits en 3D, la réalisation et la navigation dans des jumeaux numériques d’usines, de villes et autres pour tester des produits en « conditions réelles », l’organisation de réunions, conférences, et workshops (Les membres de l'équipe sont représentés soit par des avatars, soit par des hologrammes photoréalistes, qui peuvent interagir les uns avec les autres comme s'ils se trouvaient dans une vraie salle de réunion.), ainsi que l'amélioration de l'expérience d'onboarding, de recrutement et de networking. Parmi les projets les plus significatifs, on peut citer la plateforme d'onboarding et de socialisation Nth floor de Microsoft pour Accenture, ou encore Mercedes qui teste les réactions de ses voitures autonomes dans NVIDIA Omniverse face à des situations de la vie réelle (notamment dans le cadre de dilemmes éthiques). Du côté des gouvernements, celui de la ville de Séoul est le premier à sauter le pas en lançant son Metaverse dans le cadre du plan Séoul 2030. Cette initiative Smart city vise à remplacer les interactions avec l’administration et permettre d’organiser des grands rassemblements en ligne, tel que le Nouvel An 2022.

Les principaux acteurs actuels sont Microsoft avec Mesh pour Teams, Cisco WebEx Hologram, NVIDIA Omniverse et Meta avec Oculus Horizon Workrooms.

Le Métaverse d'entreprise est donc censé améliorer l'expérience de télétravail et stimuler la créativité et la productivité. Mais est-ce que la valeur ajoutée qu’il apporte justifie un investissement complémentaire de la part des entreprises ?

Nous restons encore sceptique quant aux effets bénéfiques du Metaverse d’entreprise sur le travail à distance. En effet, le Metaverse pourrait en fait exacerber les atteintes à la vie privée que l’on subit d’ores et déjà via les réseaux sociaux. Ainsi, le travail à distance dans les environnements Metaverse pourrait accroître la surveillance des employés et le présentéisme, réduisant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Cette vision est confirmée par la lanceuse d’alerte Frances Haugen, qui qualifie le Metaverse de Facebook/Meta comme une « bombe à retardement » devant les parlements français et européen.

Nous considérons que les cas d’usages les plus prometteurs ne sont soit pas encore connus, soit insuffisamment développés pour que le Metaverse d’entreprise soit véritablement pertinent :

  • Le manque de photoréalisme des avatars dans les solutions disponibles est une barrière à l’adoption. En effet, les hologrammes photoréalistes de Cisco ne sont pas encore disponible sur le marché.
  • La conception collaborative en 3D, qui permettrait par exemple à de grands industriels multinationaux de designer et tester leurs prototypes en taille réelle, n’est pas encore une fonctionnalité disponible, bien qu’elle soit très présente dans de très nombreux teasers de Metaverse

La mise en œuvre des Metaverses d'entreprise se heurte encore à de nombreux obstacles. Leurs principaux inhibiteurs sont leur manque de sécurité et de réglementation, ainsi que le coût prohibitif du matériel AR/VR. Le bien-fondé écologique de la démocratisation de ce monde virtuel peut aussi être remis en question. Effectivement, traiter et stocker les données nécessaires au fonctionnement d’un Metaverse entraine des dépenses énergétiques colossales. Cela met en exergue la nécessité de sélectionner seulement les cas d’usage qui ont une véritable valeur ajoutée pour les entreprises.

En somme, le bien-être humain est en jeu et doit être considéré comme une priorité par les acteurs du marché afin d'éviter les dérives du Metaverse.

Nous pensons que la valeur apportée par le Metaverse dans le contexte B2B au stade actuel de la technologie est insuffisante pour justifier un investissement trop important des entreprises sur le sujet. Toutefois, il est important pour les ESN de suivre les évolutions technologiques qui entourent le Metaverse B2B afin de pouvoir trouver les use cases qui apporteront le plus de valeur et justifieront des investissements complémentaires de la part des entreprises utilisatrices.

C’est la raison pour laquelle nous avons analysé ce marché émergent dans l’Insight : Metaverse: initial use cases and vendor landscape for business purposes - InSight Analysis - Worldwide

English version : https://www.sitsi.com/enterprise-metaverse-huge-shift-or-scam

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